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Green Claims Directive : prévenir l’écoblanchiment dans la mode

La Green Claims Directive entend bannir les raccourcis marketing et imposer la preuve pour chaque allégation environnementale dans la mode. Le texte, adossé aux règles de propriété intellectuelle, crée un terrain juridique nouveau : protéger ses signes tout en documentant leur véracité.

Green Claims Directive : prévenir l’écoblanchiment dans la mode

1. Green Claims Directive et propriété intellectuelle : une révolution silencieuse

D’abord, la proposition de Green Claims Directive du 22 mars 2023 complète la directive 2005/29/CE sur les pratiques commerciales déloyales et les révisions « Empowering Consumers for the Green Transition ». Elle exige qu’une marque prouve « objectivement » chaque bénéfice environnemental avancé. Le projet renvoie aux normes ISO 14020 et à la méthodologie PEF (Product Environmental Footprint) de la Commission UE. Il impose une vérification tierce et la publication d’un résumé facile à lire (art. 5 à 7).

Ensuite, cette obligation se greffe sur la propriété intellectuelle. Le nom ou le logo « GreenWear » n’est plus un signe neutre : il véhicule une promesse précise. Selon l’article 7(1)(g) du règlement (UE) 2017/1001, une marque trompeuse peut être refusée ou annulée. Le Tribunal de l’UE l’a rappelé dans l’affaire C-628/17, PlasticsEurope : la loyauté du message prime sur la distinctivité.

Cependant, la directive ne se limite pas aux marques. Les dessins ou modèles intégrant une feuille verte, un pictogramme carbone ou une mention « eco-friendly » doivent aussi respecter l’article 25 du règlement (CE) 6/2002. Ainsi, un tiers pourra demander leur nullité pour contrariété à l’ordre public s’ils induisent en erreur. Enfin, la directive oblige à maintenir la preuve « vivante ». Une promesse « coton biologique » inscrite dans un label doit être mise à jour à chaque récolte, faute de quoi l’entreprise risque une action en nullité et une procédure en concurrence déloyale, comme dans l’arrêt CA Paris, 7 mars 2022, n° 20/09348 relatif au label « clean beauty ».

2. Allégations environnementales mode : cadre légal actuel et futur

Ensuite, les allégations environnementales dans la mode se trouvent déjà sous un faisceau de normes.

  • En France, l’article L. 121-2 du Code de la consommation interdit la publicité trompeuse ; l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) sanctionne depuis 2020 l’usage non prouvé des termes « responsable » ou « durable ».
  • Au niveau européen, le règlement (UE) 1007/2011 sur l’étiquetage des fibres oblige à indiquer la composition exacte ; le projet de Règlement sur l’écoconception des produits durables (ESPR) prévoit un digital product passport pour tracer chaque étape. Par ailleurs, le règlement (UE) 2019/1020 renforce les contrôles douaniers sur les textiles qui entrent sur le marché sans documentation environnementale.

La Green Claims Directive vient harmoniser ces textes : plus de comparaisons vagues (« 50 % plus vert ») ni de références partielles (« réduit l’empreinte carbone » sans périmètre clair). Le Comité européen des normes (CEN) publiera des guides sectoriels pour le prêt-à-porter. Dans le même temps, la Cour de cassation (Com. 20 janv. 2021, n° 18-15.459) a rappelé que la mention « écoresponsable » engage la responsabilité délictuelle si elle n’est pas sourcée. Ces décisions préfigurent la sévérité des autorités quand la directive entrera en vigueur—probablement fin 2026.

3. Prouver vos green claims : méthodes, preuves et propriété intellectuelle

Cependant, prouver une allégation ne consiste pas à empiler des déclarations. Le texte impose trois piliers :

  • une étude de cycle de vie complète,
  • un tiers vérificateur accrédité EN ISO/IEC 17029,
  • un résumé « grand public » placé sur l’étiquette ou via QR Code.

Le module PEFCR (Product Environmental Footprint Category Rules) déjà testé par la Commission pour le « Textiles and Apparel » sert de référence. En pratique, la marque doit collecter 16 indicateurs, comme le CO₂ ou la consommation d’eau. Ces données nourrissent le dossier de preuve joint au dépôt de marque ou au contrat de licence. Ainsi, dans la décision EUIPO R 1873/2022-1, « Water<Less », le board a confirmé l’enregistrement car Levi’s fournissait une étude interne et deux audits BSI certifiant la réduction d’eau. À l’inverse, dans ASA UK, 17 mai 2023, « ASOS Responsible Edit », l’autorité publicitaire a exigé le retrait de la promesse faute de métrique détaillée. Le respect de la directive réduira ces litiges.

Enfin, l’entreprise doit sécuriser ses droits : clauses logicielles interdisant à un licencié de modifier un argument « green » sans accord ; enregistrement du logo avec la couleur Pantone précise pour éviter des altérations trompeuses ; surveillance automatique EUIPO des dépôts de marques contenant « eco », « bio », « sustainable » grâce aux API TMview. Ces outils transforment la conformité en défense proactive de la PI.

4. Stratégie de conformité et valorisation des actifs immatériels

Enfin, la mise en œuvre crée un avantage compétitif. Les griffes qui finalisent leurs dossiers de preuve avant 2027 pourront apposer le futur label européen et verrouiller leur storytelling. Dans le projet de Green Claims Directive, l’article 10 prévoit un « registre national des vérificateurs » et l’article 12 autorise les États à instaurer des amendes jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires annuel. Les investisseurs ESG scrutent déjà ce risque : selon le rapport 2024 du Fashion Transparency Index, 43 % des marques ont réduit les claims vagues après l’annonce de la directive.

Côté propriété intellectuelle, un portefeuille de marques « climatiquement neutres » validées multipliera la valeur de revente, comme l’illustre l’achat de Allbirds Clean (USPTO RN 6715238) par un groupe européen en 2025.

À l’autre bout, les retards coûtent cher : l’action collective intentée à New York contre un géant du denim pour un claim « carbon negative » non prouvé menace 50 millions $ d’indemnités et met en danger la marque américaine aux États-Unis et en Europe via le principe de reconnaissance mutuelle. Pour limiter ces risques, déployez un plan : audit propriété intellectuel, matrice de preuves… Ce cadre « propriété intellectuelle + conformité » rassure les distributeurs qui craignent la saisie douanière prévue par le règlement (UE) 2023/988 sur la sécurité des produits.

Conclusion

La Green claims Directive transforme la promesse verte en donnée contrôlée. Chaque allégation environnementale dans la mode devra reposer sur une preuve solide, un contrôle régulier et un alignement étroit avec vos droits de propriété intellectuelle. Commencez dès maintenant un audit complet de vos marques, designs et contenus ; constituez un dossier de cycle de vie et mettez en place une veille EUIPO et ARPP. Vous limiterez le risque d’écoblanchiment, protégerez vos actifs et valoriserez votre image durable auprès des consommateurs et des investisseurs.

Deshoulières Avocats vous conseille et vous accompagne pour auditer vos allégations environnementales, sécuriser vos marques et formaliser les preuves exigées par la Green Claims Directive, en France comme dans l’Union européenne.

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RESSOURCES :

  • Commission européenne – « Green Claims » : texte et dossier législatif, environment.ec.europa.eu
  • DLA Piper – « The Impact of the Green Claims Directive on the Fashion Retail Sector », dlapiper.com
  • Vogue Business – « The EU is targeting greenwashing claims, and fashion is a top offender », voguebusiness.com
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