La blockchain révolutionne déjà la traçabilité dans la mode. Elle garantit l’authenticité des pièces et prouve leur parcours, de l’atelier au dressing. Le Aura Blockchain Consortium normalise cette pratique et place la propriété intellectuelle au cœur de la stratégie des griffes de prestige.
1) Traçabilité et image : quand la blockchain entre en mode
La mode de luxe vend du rêve mais ne peut plus ignorer l’exigence de transparence. Chaque client souhaite connaître l’origine de son sac ou de sa robe, l’empreinte carbone du cuir, les conditions de travail des artisans. La blockchain répond à cette demande car elle inscrit, bloc après bloc, des données infalsifiables. Une fois gravée, l’information reste intacte ; personne ne peut la modifier sans laisser de trace. Ainsi, la traçabilité devient un actif stratégique. Elle maintient la confiance et protège l’image de marque.
Ensuite, le registre distribué réduit la fraude. Un faux sac peut copier un logo, mais jamais son identifiant cryptographique. Le contrôle douanier ou le client final scanne un QR code, vérifie la chaîne et détecte instantanément l’imposteur. Cette barrière technique complète les dessins et modèles enregistrés : elle matérialise le droit exclusif dans le monde numérique.
Cependant, la mise en œuvre exige une solide gouvernance. Chaque maison doit qualifier ses données : quelles étapes inscrire ? quelles métadonnées anonymiser ? Un schéma d’architecture clair évite la surcharge et protège les secrets de fabrication. Enfin, cette démarche crée un avantage ESG. Les investisseurs évaluent l’alignement environnemental ; la mode qui prouve son impact positif gagne des points. La blockchain offre la preuve, la marque en récolte la valeur.
2) Aura Blockchain Consortium : un langage commun pour maisons rivales
Ensuite, la compétition laisse la place à la coopération. LVMH, Prada ou Cartier partagent le même besoin : un format de blockchain interopérable. Ils fondent alors l’Aura Blockchain Consortium. Le protocole open-source tourne sur Quorum, une version privée d’Ethereum. Il crée un standard d’identifiant, un modèle de données et un système de gouvernance.
Chaque membre conserve toutefois ses secrets : les recettes de teinture, les plans de collection, les marges restent confidentiels. Seules les données utiles à la traçabilité sortent du périmètre interne. Le Consortium impose aussi des audits de sécurité réguliers et applique la norme ISO 27001. Grâce à cette discipline, une maison moyenne peut rejoindre le réseau sans craindre la fuite d’information.
Cependant, l’adhésion n’est pas gratuite. L’onboarding technique mobilise les services achats, IT et juridiques. Il faut cartographier les flux, créer les API, former les ateliers. Pour réduire la charge, Aura propose un « starter kit » et accompagne les fournisseurs.
3) Preuve, contrefaçon et propriété intellectuelle : des atouts juridiques concrets
Cependant, la valeur d’Aura ne se limite pas à la logistique. Elle renforce la protection de la propriété intellectuelle. D’abord, chaque bloc horodaté constitue une preuve d’antériorité, recevable devant le juge selon l’article 1379 du Code civil et du règlement eIDAS (UE) 910/2014. En cas de litige, la marque présente le hachage du dessin, daté et signé, pour prouver la création.
Ensuite, les douanes disposent d’un accès API. Elles vérifient un colis en temps réel, comparent le numéro de série et bloquent le faux. Cette coopération s’appuie sur l’article 9 du règlement (UE) 608/2013 relatif à la gestion des marchandises suspectes. La blockchain devient ainsi un outil de police économique.
Enfin, les « smart contracts » facilitent la rémunération des droits secondaires. Lors de chaque revente en marketplace, le contrat en chaîne déclenche une redevance automatique en faveur de la maison ou du créateur. Cette clause s’accorde avec l’article L.131-4 du Code de la propriété intellectuelle, qui reconnaît la cession partielle de droits. Le mécanisme renforce aussi le droit de suite pour l’artiste, prévu par la directive 2001/84/CE. Les juristes doivent toutefois vérifier la conformité fiscale et rédiger une clause de choix de loi compétente.
4) Mettre en place Aura : checklist contractuelle et conformité RGPD
Réussir un projet Aura Blockchain Consortium suppose une approche juridique méthodique. D’abord, le contrat de consortium définit la titularité du code : l’alliance détient les droits patrimoniaux, chaque maison reçoit une licence mondiale, non exclusive, incessible hors groupe. Ensuite, il faut encadrer le service. Le contrat doit préciser la responsabilité conjointe ; elle se limite aux dommages directs, exclut le manque à gagner, sauf faute lourde.
Cependant, la blockchain traite des données personnelles : historique d’achats, parfois identité pour la garantie. Le RGPD exige une base légale. Le consentement paraît adapté, mais il doit rester libre, spécifique et révocable. Le droit à l’effacement pose problème, car un bloc reste pérenne. La solution : l’article 17 §2 RGPD autorise cette « anonymisation irréversible ».
Enfin, la marque doit réaliser une analyse d’impact (AIPD) si la traçabilité traite des données à grande échelle. Le délégué à la protection des données (DPO) pilote l’exercice. Il vérifie la pseudonymisation, l’architecture zéro connaissance et la localisation des nœuds. Une gouvernance claire protège ainsi l’entreprise contre les sanctions de la CNIL, qui peuvent atteindre 4 % du chiffre d’affaires mondial.
Conclusion
La blockchain, appliquée à la traçabilité dans la mode, bouleverse la chaîne de valeur. Le Aura Blockchain Consortium offre un standard fiable, reconnu et interopérable. Il produit une preuve forte, réduit la contrefaçon et prépare le passeport numérique européen. Pour tirer parti de ce levier, cartographiez vos flux, rédigez un contrat de consortium équilibré et intégrez le RGPD dès la conception. Vous sécuriserez ainsi votre propriété intellectuelle et préserverez la confiance de vos clients.
Deshoulières Avocats vous conseille et vous accompagne dans le déploiement d’une solution de blockchain conforme et pérenne.
RESSOURCES :
- Règlement eIDAS (UE) 910/2014 sur l’identification électronique
- Règlement (UE) 608/2013 sur la surveillance douanière des droits de propriété intellectuelle
- Code civil, art. 1379 ; Code de la propriété intellectuelle, art. L.131-4
- Deshoulières Avocats, « Blockchain : le guide pratique pour protéger les données personnelles et rester conforme au RGPD«