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RGPD et ciblage pub : se mettre en conformité avec la CNIL

Le ciblage publicitaire est devenu la clef de voûte de la monétisation du web. Mais transformer les données personnelles en revenus sans violer le RGPD est un exercice d’équilibriste : la CNIL veille et les sanctions sont lourdes. Comprendre les règles, poser les bons choix de consentement et documenter ses pratiques sont aujourd’hui des impératifs stratégiques pour toute entreprise qui recourt aux cookies et autres traceurs.

1) Comprendre le cadre RGPD du ciblage publicitaire

Le RGPD définit une donnée personnelle comme toute information permettant d’identifier, directement ou indirectement, une personne physique. Le ciblage publicitaire, qui consiste à diffuser des messages adaptés à un individu ou à un groupe restreint, entre donc pleinement dans son champ d’application. La CNIL rappelle que cette technique repose « sur l’identification des personnes afin de leur présenter des messages personnalisés ».

Dès lors, un annonceur qui segmente son audience doit déterminer une base juridique. En matière de prospection commerciale B2C, le RGPD privilégie le consentement explicite (article 6, §1-a). L’intérêt légitime (article 6, §1-f) peut, sous conditions strictes, fonder des opérations de marketing auprès de professionnels ou d’anciens clients. La CNIL souligne toutefois que l’intérêt légitime « ne se présume jamais » et suppose une évaluation rigoureuse de l’impact sur la vie privée. Elle insiste sur la nécessité de tests d’équilibre et de mesures de transparence renforcées.

Par ailleurs, toutes les publicités en ligne ne sont pas synonymes de profilage. L’autorité rappelle qu’une bannière contextuelle, affichée simplement en fonction du contenu d’une page, n’implique pas de suivi individuel. Elle peut donc échapper au consentement, sous réserve de ne mobiliser aucun traceur.

Enfin, les acteurs doivent garder à l’esprit le principe de minimisation. Seules les données strictement nécessaires à la finalité marketing peuvent être collectées. L’âge, la localisation ou les centres d’intérêt ne sont licites qu’à proportion de la précision réellement utile pour la campagne.

2) Consentement et cookies : les fondements incontournables

Les cookies et autres traceurs constituent la pierre angulaire du ciblage publicitaire. En droit français, l’article 82 de la loi Informatique & Libertés – transposition de la directive e-Privacy – impose le consentement préalable à tout dépôt non strictement nécessaire au service demandé par l’utilisateur. La CNIL rappelle que ce consentement doit être libre, spécifique, éclairé et univoque, recueilli par une action positive et documenté. Le simple fait de poursuivre la navigation n’est plus admis comme preuve valable.

La notion de cookie-wall cristallise les tensions entre éditeurs et régulateurs : conditionner l’accès à un service au dépôt de traceurs publicitaires peut, selon la CNIL, ôter tout caractère libre au consentement, sauf à offrir une véritable alternative sans traçage. À défaut, l’utilisateur se voit enfermé dans un choix binaire contraire à l’esprit du RGPD. Cette analyse, réaffirmée dans les lignes directrices de 2023, oblige les sites à prévoir un parcours « continuer sans accepter » clair et accessible.

Au-delà du consentement initial, le RGPD confère à la personne un droit permanent de retrait. Concrètement, chaque bannière ou centre de préférences doit permettre à l’internaute de modifier ses choix à tout moment, aussi simplement qu’il les a exprimés. Les traceurs concernés doivent alors être supprimés ou rendus inactifs sans délai injustifié. Ignorer cette exigence revient à prolonger un traitement sans base légale.

3) Bonnes pratiques recommandées par la CNIL

Se conformer ne se limite pas à afficher une bannière. Le premier réflexe consiste à cartographier tous les traceurs utilisés : tags internes, SDK mobiles, pixels tiers, solutions d’attribution… Cette photographie permet d’identifier les partenaires destinataires et de vérifier les clauses contractuelles encadrant la sous-traitance au sens de l’article 28 RGPD.

Ensuite vient le principe de privacy by design. Avant de lancer une nouvelle campagne, l’équipe marketing doit interroger la nécessité de chaque donnée : puis-je atteindre le même objectif avec un ciblage contextuel ? Une segmentation moins fine suffirait-elle ? Cette réflexion, retracée dans un registre de traitement et, le cas échéant, dans une analyse d’impact (DPIA), démontre l’état d’esprit de responsabilité exigé par l’article 24.

La CNIL publie régulièrement des fiches pratiques pour guider les acteurs. La dernière en date, consacrée au web-scraping, rappelle que la collecte automatisée d’adresses ou de profils sur les réseaux sociaux ne dispense pas de respecter l’obligation d’information et le droit d’opposition des personnes concernées. Des mesures spécifiques – limitation de périmètre, suppression rapide des données inutiles, mécanisme de désinscription – sont attendues.

Enfin, la gouvernance de la conformité passe par la désignation d’un DPO rompu aux problématiques de ciblage publicitaire. Ce délégué centralise l’information, forme les équipes et devient l’interlocuteur privilégié de la CNIL en cas de contrôle.

4) Risques et sanctions en cas de non-conformité

Ne pas respecter ces principes expose à un double péril.

  • D’abord, le risque financier. La CNIL peut infliger jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires mondial ou 20 millions d’euros. Ainsi, plusieurs majors de la tech ont déjà écopé de sanctions record pour absence de consentement valable, paramétrages trompeurs des cookies ou manque de transparence.
  • Vient ensuite le risque réputationnel. Dans un marché où la confiance conditionne la conversion, être épinglé pour pratiques intrusives peut entraîner une fuite durable des utilisateurs et des annonceurs. Les obligations de notification des violations de données, imposant un courrier explicite aux victimes, amplifient encore l’impact médiatique d’un manquement.
  • Enfin, le risque opérationnel. Un contrôle peut geler tout un dispositif publicitaire, priver une start-up de sa principale source de revenus ou retarder une levée de fonds. Anticiper, documenter, réviser régulièrement ses process permet d’éviter qu’une injonction ne se transforme en coup d’arrêt stratégique.

Conclusion

Le ciblage publicitaire demeure un levier puissant, mais il n’est performant que s’il repose sur un traitement loyal, transparent et respectueux de la vie privée. Retenir le consentement comme principe, recourir à l’intérêt légitime avec discernement, limiter les cookies aux traceurs vraiment nécessaires : tels sont les piliers d’une stratégie conforme au RGPD. Un diagnostic annuel, l’actualisation des bannières et la vigilance vis-à-vis des partenaires sont autant de réflexes à inscrire dans la durée pour sécuriser son modèle d’affaires.

Deshoulières Avocats vous conseille et vous accompagne afin de sécuriser votre ciblage publicitaire et de transformer la conformité RGPD en atout concurrentiel.

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