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Marques : éviter les signes interdits ou contraires à l’ordre public

Avant de déposer une marque, vérifiez si votre signe heurte l’ordre public ou les bonnes mœurs, ou s’il tombe dans une interdiction légale spécifique : sans cette précaution, l’INPI refusera l’enregistrement ou un juge l’annulera. Comprendre ces limites protège votre budget et votre réputation.

1) L’ordre public et les bonnes mœurs : le filtre éthique du droit des marques

L’ordre public désigne les règles qui préservent la sécurité, la dignité et la cohésion sociales. Les « bonnes mœurs » reflètent la morale commune à une époque donnée. La marque, vecteur de communication de masse, ne peut violer ces valeurs. Le Code de la propriété intellectuelle affirme que « ne peut être adopté comme marque un signe contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs ». L’INPI applique ce principe dès l’examen : slogan raciste, symbole pornographique ou glorification de crimes célèbres sont rejetés sans appel. Puis, le juge intervient lorsqu’une demande de nullité est déposée.

  • En mai 2021, la Cour de cassation a annulé « Fiproline » : le signe suggérait un antiparasitaire sans autorisation vétérinaire, créant un risque pour la santé publique.
  • À l’inverse, la CJUE a validé « Fack Ju Göhte » en 2020, car — contextualisé par un film à succès — il ne choquait plus le public germanophone moyen.

Le critère est donc dynamique.

Enfin, l’ordre public protège aussi la liberté d’expression collective : l’INPI a refusé « Je suis Paris », récupérant un slogan de solidarité pour un usage commercial, considérant qu’une appropriation privative priverait le débat public.

2) Comment l’INPI et les tribunaux mesurent le degré d’offense

En premier lieu, l’examinateur analyse le signe dans sa globalité : graphisme, sonorité, message implicite. Une imagerie légère ne suffit pas ; il faut un choc manifeste pour le public pertinent. La perception s’apprécie au moment du dépôt, pas vingt ans plus tard : un terme jadis neutre peut devenir offensant, ou l’inverse.

Ensuite, l’autorité étudie le contexte de commercialisation. Le mot « Band Gang » pour des vêtements vise un public large, incluant des mineurs ; l’INPI l’a annulé en 2020, la locution renvoyant à un viol collectif. En revanche, « Désir Sexe » pour des sites pornographiques reste licite : le contenu se destine à des adultes avertis ; l’expression n’incite ni haine ni violence.

Enfin, la notion de « public pertinent » varie. Dans l’affaire « Ficken », l’EUIPO a refusé la marque pour des boissons vendues en grande surface ; le message cru toucherait aussi des personnes qui n’achèteront jamais ce produit. Le juge inclut donc tous ceux qui verront le signe, non les seuls clients.

3) Les signes légalement interdits : quand une loi spéciale prime

Ensuite, certains symboles ou mots sont verrouillés par des textes hors du droit des marques.

  • Première catégorie : santé publique. La loi Évin bannit la publicité indirecte en faveur du tabac ; un flacon de parfum en forme de cigare ou un logo rappelant une marque de cigarettes expose son titulaire à une sanction pénale, même si la marque est enregistrée.
  • Deuxième catégorie : indications officielles. Le Code du sport réserve les anneaux olympiques et les termes « Jeux Olympiques » au CNOSF. Déposer « Paris 2024 » sans autorisation expose à quatre ans de prison et 400 000 € d’amende.
  • Troisième catégorie : appellations d’origine et indications géographiques. Employer « Champagne » ou « Darjeeling » pour des biens non conformes au cahier des charges viole le Code rural et l’Accord ADPIC. Le simple fait de traduire (« Champanskoïe ») ou de parodier (« Champanillo » pour des bars à tapas) suffit à caractériser l’atteinte.

Enfin, la réglementation sectorielle interdit certains termes techniques. L’expression « beurre liquide » a été jugée illicite : le règlement européen définit le beurre par sa consistance. Déposer un tel oxymore crée une tromperie légale sur la nature du produit.

4) Stratégie de dépôt : bonnes pratiques pour sécuriser votre marque

En premier lieu, auditez votre signe avant toute démarche. Consultez la base INPI, la base EUIPO, la base « 6ter Express » pour les emblèmes officiels, et les registres INAO pour les AOP / IGP. Identifiez les symboles religieux, politiques ou sexuels explicites ; éliminez-les si votre audience inclut des mineurs.

Puis, testez le ressenti. Présentez le logo à un panel neutre pour vérifier qu’aucune connotation choquante ou trompeuse n’apparaît. Cependant, prévoyez l’usage publicitaire : même une marque recevable peut devenir illicite si vos supports marketing contournent la loi Évin ou les règles anti-tabac.

Il convient également de garder une traçabilité documentaire. Conservez les études de perception, les autorisations administratives éventuelles et les certificats de conformité. Ces pièces faciliteront votre défense en cas d’opposition ou d’action en nullité.

Conclusion

L’ordre public, les bonnes mœurs et les interdictions légales limitent la créativité nominale, mais ils sécurisent la confiance des consommateurs. Avant de déposer, analysez l’éthique, la loi sectorielle et l’origine géographique. Vous éviterez le refus, la nullité et la crise d’image

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