Le marketing d’affiliation séduit marques et créateurs, mais il entre aussi dans le radar de la DGCCRF. Transparence du partenariat, respect de la propriété intellectuelle, responsabilité des plateformes : autant de points chauds que la Répression des fraudes contrôle de près. Tour d’horizon pour éviter l’amende et protéger ses actifs.
1) Marketing d’affiliation et propriété intellectuelle : un cadre légal qui se resserre
Le marketing d’affiliation repose sur un échange : l’affilié promeut un contenu contre une rémunération ou un avantage. Ce lien financier le fait basculer dans l’« influence commerciale » au sens de la loi de juin 2023. La DGCCRF exige alors une parfaite transparence : l’internaute doit comprendre immédiatement qu’il s’agit d’une opération rémunérée. Le défaut de mention « partenariat » ou « publication commerciale » expose à deux ans de prison et 300 000 € d’amende. Une injonction de déréférencement peut suivre.
Ensuite, la propriété intellectuelle entre en jeu : diffuser un logo ou un visuel sans autorisation viole le Code de la propriété intellectuelle. La marque peut agir sur deux fronts : contrefaçon et pratiques commerciales trompeuses. Enfin, le règlement européen DSA renforce ces obligations pour les plateformes : elles doivent retirer sans délai les contenus illicites signalés, sous peine de sanctions pécuniaires lourdes.
Ensuite, gardons à l’esprit la notion de responsabilité partagée. L’annonceur, l’affilié et quelquefois la plateforme peuvent tous être mis en cause. Le tribunal retient souvent la coresponsabilité dès lors que chacun profite de l’opération. Cela concerne aussi les contenus générés par l’intelligence artificielle : si un outil IA reproduit une œuvre protégée, la violation est automatique. Le marketing d’affiliation ne saurait ignorer ces risques ; rédiger des clauses claires sur la titularité des droits devient indispensable.
Cependant, un contrat ne suffit pas. Les parties doivent organiser un « processus de validation » interne : l’annonceur vérifie chaque post avant publication, l’affilié conserve la preuve de la mention « partenariat rémunéré ». Cette traçabilité permettra de prouver la bonne foi en cas de contrôle DGCCRF.
La jurisprudence récente montre que le juge sanctionne aussi l’usage illicite de marques dans les codes promo ou URL d’affiliation : ces pratiques attirent l’audience mais diluent l’indication d’origine, ce qui constitue un acte de concurrence déloyale.
2) Transparence : quelles obligations pour les partenaires ?
D’abord, la règle : toute communication doit porter une mention expresse (« pub », « sponsorisé », « partenariat ») dès le premier coup d’œil. Selon le guide « Suis-je influenceur ? » de la DGCCRF, le caractère commercial doit être « immédiatement identifiable ». Cette mention doit être dans la même langue que le reste du contenu et rester visible, même après partage ou republication. Ensuite, l’affilié doit pouvoir prouver qu’il a conclu un partenariat : facture, contrat, ou captures d’écran horodatées.
Cependant, la transparence ne se limite pas au texte. Les filtres retouchant un produit cosmétique doivent être signalés. Les liens d’affiliation masqués derrière un raccourcisseur d’URL trompent le consommateur. La DGCCRF les qualifie de pratique trompeuse. Enfin, le public mineur appelle une vigilance accrue. Les influenceurs visés doivent s’assurer que tout message payant respecte aussi la législation sur la protection des enfants et la publicité ciblée.
Ensuite, l’obligation s’étend aux jeux-concours. Si l’opération comprend un tirage au sort, on bascule dans la réglementation « Jeux & loteries ». Le règlement du jeu, la valeur des lots et les frais de participation doivent être accessibles. Une absence de règlement peut déclencher une amende administrative. Le caractère aléatoire appelle aussi le respect de la législation sur les loteries publicitaires : pas de paiement obligatoire pour participer, sous peine de nullité.
Enfin, les codes promo exclusifs doivent être sincères : « -20 % » ne peut cacher une hausse préalable du prix. La DGCCRF contrôle les historiques tarifaires et sanctionne la « fausse remise ». Les affiliés doivent donc vérifier les pratiques tarifaires de l’annonceur pour éviter d’être complices d’une tromperie.
Contrôles et sanctions de la DGCCRF : un niveau de risque en hausse
D’abord, les chiffres parlent. Lors de ses enquêtes 2023-2024, la DGCCRF a relevé 60 % d’anomalies chez les influenceurs contrôlés. Les sanctions varient : avertissement, amende administrative pouvant atteindre 75 000 €, voire transmission au procureur pour pratique commerciale trompeuse. Ensuite, les agents disposent de nouveaux pouvoirs depuis 2022 : déréférencement d’un compte, retrait de la vidéo litigieuse, et astreinte journalière jusqu’à mise en conformité.
Cependant, la DGCCRF cible aussi les annonceurs. Un e-commerçant qui délègue son marketing d’affiliation reste responsable des fausses allégations de l’affilié sur la composition d’un produit cosmétique. Les pénalités peuvent dépasser le chiffre d’affaires de la campagne. Le régulateur a rappelé ce principe lors d’un protocole signé avec l’Autorité nationale des jeux pour surveiller les contenus liés aux paris sportifs, terrain fertile pour l’affiliation.
Ensuite, les codes sectoriels évoluent. L’ARPP a lancé le Certificat « Influence Responsable » : près de 1 800 créateurs certifiés en 2024, et une version 2.0 depuis avril 2025. Ce label est preuve d’une formation spécifique sur la transparence. La DGCCRF en tient compte : obtenir le certificat peut atténuer une sanction, à condition d’appliquer réellement les bonnes pratiques.
Enfin, notons que les contrôles s’internationalisent. La DGCCRF coopère avec ses homologues européens via le Consumer Protection Cooperation Network. Un affilié basé hors UE, mais ciblant un public français, peut recevoir une injonction transfrontalière. Le risque d’interdiction d’exercer sur le territoire pendant cinq ans devient tangible.
Anticiper les risques : bonnes pratiques contractuelles
D’abord, formalisez. Un contrat d’affiliation doit lister les obligations de transparence, la titularité des droits de propriété intellectuelle sur les visuels, et une clause « stop-pub » : l’affilié retire tout contenu dès la fin du partenariat. Ensuite, sécurisez la chaîne d’approvisionnement des contenus : utilisez des banques d’images ou des créations originales. Joignez les licences à l’accord pour prouver votre bonne foi en cas de litige.
Cependant, le contrat doit aussi prévoir un droit de contrôle. L’annonceur peut vérifier, avant diffusion, la conformité du message. Une clause pénale graduée (retenue de commission, résiliation) incite l’affilié à respecter les règles. Dans le même esprit, fixez un périmètre clair pour la promotion : pas de revente de code promo sur des forums de deals, pas d’achats de followers pour booster la visibilité.
Ensuite, pensez au tableau de bord de conformité. Centralisez preuves de mention « partenariat », factures, screenshots, certificats ARPP. Ce dossier facilite la réponse à une demande d’informations DGCCRF sous 48 h. Mettez en place une veille automatisée : repérez chaque reprise du contenu sur TikTok, YouTube ou Instagram. Supprimez les reposts sans mention commerciale.
Enfin, adoptez l’angle consommateur. Oublier la mention d’une contrepartie financière nuit à la confiance et réduit la valeur du marketing d’affiliation. Un message clair renforce la crédibilité et améliore le taux de conversion. Les marques qui jouent la carte de la transparence voient leur réputation protégée, rare atout à l’heure où un bad buzz réduit à néant des années de communication.
Conclusion
Le marketing d’affiliation offre un levier puissant, mais la DGCCRF veille. Obligation de transparence, maîtrise des droits de propriété intellectuelle, vigilance sur les jeux : les contrôles se durcissent. Mieux vaut contractualiser, auditer et conserver ses preuves. En pratique, vérifiez chaque mention « partenariat » avant publication et archivez-la ; vous éviterez ainsi l’amende et un retrait de contenu.
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RESSOURCES :
- ARPP – Recommandation « Communication publicitaire numérique » (version 5, juin 2024) arpp.org
- Règlement (UE) 2022/2065 “Digital Services Act” – commission.europa.eu
- Code de la consommation : articles L. 121-1 et suiv. (pratiques commerciales trompeuses)
- Code de la propriété intellectuelle : articles L. 713-2 et suiv. (usage illicite de marque)