Sélectionner une page

Déposer une œuvre générée par IA : mission impossible ?

Les générateurs d’images ou de textes assistés par intelligence artificielle fascinent le public et inquiètent les juristes. Peut-on vraiment déposer une œuvre générée par IA ? La réponse dépend du rôle créatif de l’humain : sans intervention suffisamment marquée, le droit d’auteur, pilier de la protection œuvre générée IA, reste clos.

Déposer une œuvre générée par IA : mission impossible ?

1. L’IA bouscule la notion d’œuvre protégée

D’abord, une œuvre doit relever du Code de la propriété intellectuelle. L’article L 112-2 vise toute création perceptible, qu’elle soit peinte à la main ou produite par algorithme. Toutefois, la jurisprudence exige une forme originale, reflet d’un choix créatif humain.

Dans une création générée par IA, l’ordinateur traite des données et applique des paramètres fixés par une personne. L’outil, si sophistiqué soit-il, reste un moyen d’expression, au même titre qu’un appareil photo. La Cour de cassation a déjà étendu cette logique aux logiciels et jeux vidéo : le caractère automatique du procédé n’exclut pas la protection, à condition qu’un apport intellectuel soit démontré. Ainsi, la technologie déplace les repères sans abolir les critères classiques : intervention humaine, matérialisation de l’idée et cohérence créative.

2. Originalité et intervention humaine : la clé

Ensuite, le déposant doit prouver que l’œuvre porte « l’empreinte » de ses choix. Dans la pratique française, la Bibliothèque Nationale de France enregistre tout fichier, mais ce dépôt n’a qu’une fonction probatoire ; il ne crée pas de droit.

Le vrai verrou, c’est l’originalité. Or l’IA peut générer des images quasi identiques si les mêmes paramètres sont utilisés. Pour franchir l’obstacle, l’auteur doit décrire son rôle : sélection des données d’entraînement, paramétrage du modèle, choix et arrangement des sorties. Ces étapes préparatoires, souvent longues et coûteuses, traduisent un effort créatif que la jurisprudence valorise, même sans pinceau ni clavier.

L’exigence rejoint la définition européenne : « création intellectuelle propre à l’auteur », issue de l’arrêt Infopaq et confirmée par la directive 2001/29 / CE. Autrement dit, la protection œuvre générée IA existe, mais elle se gagne, elle ne s’octroie pas automatiquement.

3. Le précédent américain : un signal fort pour l’œuvre générée par IA

De l’autre côté de l’Atlantique, le U.S. Copyright Office exige désormais une déclaration précise des éléments générés par IA lors d’une demande d’enregistrement. Son Guidance for Works Containing AI-Generated Material (mise à jour 2024) rappelle que seuls les segments issus de « créativité humaine » obtiennent le copyright. L’Office a rayé du registre plusieurs bandes dessinées ou tableaux produits quasi exclusivement par IA, malgré des invites très détaillées. À l’inverse, il a validé des œuvres où l’auteur a retouché, recadré ou combiné plusieurs sorties, démontrant une maîtrise esthétique.

Cette position illustre une tendance mondiale : l’utilisateur reste auteur s’il façonne l’output, mais pas s’il se contente d’un simple prompt. Pour les entreprises françaises qui ciblent le marché US, anticiper ce filtrage s’avère crucial : constituez un dossier prouvant votre apport créatif avant tout dépôt.

4. Vers une gouvernance internationale : WIPO et UNESCO en éclaireurs

Enfin, la réflexion dépasse les frontières. L’Organisation Mondiale de la Propriété intellectuelle (OMPI) organise depuis 2019 la série de réunions « Conversation on AI and IP » ; les dernières sessions abordent le dilemme du copyright des données d’entraînement et la définition d’un seuil d’intervention humaine pour les sorties générées. Parallèlement, la Recommandation de l’UNESCO sur l’éthique de l’IA (2021) encourage les États à garantir la supervision humaine et la transparence des algorithmes. Elle invite aussi les législateurs à combiner innovation et respect des droits d’auteur, afin d’éviter les « zones grises » où ni l’homme ni la machine n’assument la paternité.

Ces textes non contraignants orientent cependant les réformes : l’Union européenne discute déjà d’un certificat de transparence pour les modèles génératifs. Les chefs d’entreprise gagneront donc à surveiller ces évolutions, car elles annonceront le cadre futur de la protection œuvre générée IA.

Conclusion

Déposer une œuvre générée par IA n’est pas une mission impossible, mais une opération sous conditions. Vous devez : identifier les choix créatifs effectués, conserver les étapes de paramétrage, isoler les sections purement humaines et, le cas échéant, déclarer leur proportion lors du dépôt. Sans ces précautions, le refus d’enregistrement – ou l’annulation en justice – guette. Mieux vaut donc anticiper la preuve de votre intervention et planifier la gestion des droits en amont de tout lancement commercial.

Deshoulières Avocats vous conseille et vous accompagne de la phase de création jusqu’à l’exploitation, en sécurisant vos dépôts et vos contrats relatifs à l’intelligence artificielle.

DEMANDER UN DEVIS GRATUIT

RESSOURCES :

Partager :

Une question ?
Deshoulières Avocats a été classé parmi les meilleurs cabinet d’avocats en droit des nouvelles technologies par le journal Le Point.

Nous conseillons et défendons plus de 750 entreprises, en France et à l’international.

DEVIS GRATUIT

Demandez dès à présent un devis gratuit. Deshoulières Avocats s’engage à vous répondre sous 24h.

UNE QUESTION ? UN BESOIN ? CONTACTEZ-NOUS

Deshoulières Avocats conseille et défend plus de 750 entreprises, en France et à l’international.