Le contrat de joueur esport est le socle juridique qui sécurise la relation entre le joueur professionnel et son équipe. Pour éviter litiges et requalification, certaines clauses – notamment celles touchant à la propriété intellectuelle – sont incontournables. Voici les points clés à connaître avant de signer.
1) Déterminer la nature et la durée du contrat
D’abord, sachez que le législateur français a créé le CDD esport pour encadrer la relation salariale. Le décret n° 2017-872 fixe une durée minimale de douze mois et une limite de cinq ans. Seules deux exceptions — remplacement d’un joueur ou alignement sur la fin de saison fixée par arrêté — autorisent une durée plus courte.
Ensuite, le texte impose à la structure un agrément ministériel ; sans lui, le contrat risque une requalification en CDI, avec rappel de salaire et indemnités majorées. Dans votre contrat, insérez donc :
- la référence à l’agrément,
- la date précise de début et de fin,
- puis la clause rappelant l’absence d’indemnité de précarité spécifique à ce CDD spécial.
Enfin, prévoyez un avenant automatique si l’éditeur du jeu modifie le calendrier de saison : vous limitez ainsi les risques de rupture abusive.
2) Fixer la rémunération et les obligations sociales de l’équipe
Ensuite, encadrez la rémunération. Le modèle proposé par Contractbook liste un salaire fixe, des primes de performance et un remboursement intégral des frais de déplacement. Inspirez-vous-en, mais détaillez chaque poste pour éviter un litige futur : montant mensuel brut, dates de paiement, régime de mutuelle et taux de cotisations.
Par ailleurs, le contrat doit rappeler l’article L 4121-1 du Code du travail : l’équipe assure la santé et la sécurité du joueur, que ce soit en ligne ou lors d’événements physiques. Ajoutez un suivi médical annuel et un soutien psychologique ; vous démontrez une obligation de moyens renforcée.
De plus, pour un joueur mineur, prévoyez le dépôt sous séquestre d’une partie des gains, pratique exigée dans d’autres secteurs sportifs. Enfin, introduisez une clause d’indexation des primes sur le classement officiel validé par l’éditeur, afin que le calcul reste transparent pour chaque partie.
3) Organiser la cession des droits d’image et des contenus
Cependant, la valeur d’un joueur tient surtout à son image. L’article L 333-1 du Code du sport attribue aux organisateurs le droit d’exploitation des compétitions, mais le contrat peut répartir les droits dérivés. D’abord, cédez au club une licence non exclusive sur le pseudonyme, l’avatar et la voix, limitée à la durée du contrat et au territoire visé par la compétition.
Ensuite, autorisez l’équipe à diffuser des extraits de stream dans ses contenus promotionnels. En contrepartie, laissez au joueur 100 % des revenus de ses chaînes personnelles, sauf si l’organisation fournit le matériel ou l’encadrement ; un partage de vingt pour cent est alors courant, comme le montre le modèle Contractbook.
Par ailleurs, précisez les modalités de merchandising : T-shirts, figurines ou NFT. Enfin, incluez une clause de respect des marques déposées par l’éditeur pour éviter toute atteinte à la propriété intellectuelle de tiers.
4) Encadrer le comportement, la confidentialité et la fin de contrat
Enfin, sécurisez la sortie du joueur. Une clause disciplinaire interdit la triche, les paris clandestins, le dopage numérique et tout discours haineux. Le contrat doit prévoir une rupture immédiate pour faute grave, assortie d’un préavis réduit de trente jours. Ensuite, une clause de non-concurrence peut s’imposer si elle reste proportionnée : six mois maximum, un seul jeu, et une indemnité au moins égale à trente pour cent du salaire moyen. Par ailleurs, protégez les données stratégiques : documents d’entraînement, schémas tactiques et statistiques collectées par l’équipe doivent rester confidentiels deux ans après la fin du contrat.
Pour clore, insérez une clause compromissoire : médiation conventionnelle en premier recours, puis arbitrage auprès du Tribunal arbitral du sport. Ainsi, vous gagnez en rapidité et limitez les frais de justice. Le modèle de licence joueur publié sur Scribd illustre ces mécanismes et peut servir de point de départ à votre rédaction.
Conclusion
Le contrat de joueur esport doit donc combiner : un CDD sécurisé, une rémunération claire, une cession d’image maîtrisée et un dispositif disciplinaire équilibré. Prenez le temps de relire chaque clause ; un mot de trop peut renverser la balance lors d’un litige. Pour finir, faites valider le projet par un avocat spécialisé avant signature : c’est le meilleur moyen de protéger votre équipe comme vos ambitions.
Deshoulières Avocats vous conseille et vous accompagne dans la rédaction, la négociation et la sécurisation de vos contrats de joueur esport, afin de protéger vos actifs immatériels et de garantir la conformité de votre équipe aux règles françaises et internationales.
RESSOURCES :
- Décret n° 2017-872 du 9 mai 2017 relatif au statut des joueurs professionnels salariés de jeux vidéo compétitifs.
- Articles 101 et 102 de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique.
- Code du sport, articles L.333-1 et suiv. sur les droits d’exploitation des compétitions.