Le législateur a inséré l’esport dans le Code du sport afin de sécuriser l’organisation des tournois et la situation des joueurs professionnels. Comprendre ce statut légal de l’esport est donc indispensable pour créer, financer ou participer à une compétition de jeux vidéo en France.
1. L’insertion de l’esport dans le Code du sport
D’abord, la loi pour une République numérique (2016) a créé l’article L321-8 du Code de la Sécurité Intérieure. Ce texte reconnaît la « compétition de jeux vidéo » comme un évènement sportif à part entière. Le Code fixe trois principes :
- la participation financière des joueurs doit rester modérée,
- la répartition des gains doit être connue à l’avance,
- et le résultat doit reposer principalement sur l’habileté – non sur le hasard.
En conséquence, les tournois d’esport échappent au régime des jeux d’argent, source de lourdes contraintes administratives. Ils sont également exclus du champ des paris illicites. Grâce à cette double reconnaissance dans le statut légal de l’esport, les organisateurs disposent d’un cadre clair. Ils n’ont plus à négocier au cas par cas avec la DGCCRF ou l’Autorité nationale des jeux. Cependant, le juge pourra requalifier un évènement si les critères précités ne sont pas respectés.
2. Organiser un tournoi : conditions et déclarations relevant du statut légal de l’esport
Ensuite, l’article L321-8 impose le dépôt d’un règlement précisant notamment : format, critères de sélection, montant exact des lots et calendrier de versement. Le dépôt doit intervenir au plus tard un mois avant le premier match. En parallèle, si la valeur des prix dépasse 10 000 €, un garant financier est obligatoire.
Le Code du sport prévoit d’autres obligations déjà connues du secteur sportif : assurance responsabilité civile (art. L321-7) et sécurité du public. De plus, toute manifestation qui distribue plus de 3 000 € de récompenses et s’adresse aux licenciés relève de la procédure d’autorisation fédérale. Les promoteurs doivent donc vérifier le cumul de régimes juridiques : esport, sport traditionnel, voire spectacle vivant si la jauge excède 1 500 spectateurs.
Enfin, l’Agence nationale de sécurité sanitaire recommande un encadrement médical lorsque l’évènement se déroule en continu plus de huit heures.
3. Joueur professionnel : un statut sécurisé
Cependant, reconnaître l’esport comme activité sportive ne suffisait pas ; il fallait aussi protéger les joueurs salariés. Le décret n° 2017-872 du 9 mai 2017 crée le contrat de joueur professionnel de compétition de jeux vidéo. Calqué sur le CDD « sportif », ce contrat :
- fixe une durée maximale de cinq ans ;
- garantit un salaire au moins égal au SMIC ;
- prévoit un repos quotidien de onze heures et un repos hebdomadaire de vingt-quatre heures ;
- oblige l’employeur à financer la formation et la reconversion du joueur.
Le joueur bénéficie du régime général de la sécurité sociale et d’une présomption d’accident du travail lors des matchs officiels. Pour les équipes, cette formalisation offre une visibilité sociale et fiscale. Dans la pratique, l’inspection du travail exige la tenue d’un registre des horaires et le respect strict des pauses, même en bootcamp.
4. Statut légal de l’esport, paris sportifs et fiscalité
Enfin, la frontière entre divertissement, sport et pari doit être claire. Depuis 2020, seule l’Autorité nationale des jeux (ANJ) peut autoriser les paris sur des compétitions listées. Les fédérations ou ligues peuvent demander l’inscription ou la suppression d’un tournoi à cette liste. Les compétitions de jeux vidéo ne sont pas exclues a priori, mais l’ANJ vérifie la fiabilité du scoring et l’absence de conflit d’intérêts. Pour l’organisateur, l’inscription à la liste ouvre la porte aux sponsors bookmakers ; elle implique aussi la mise en place d’un dispositif de prévention de la manipulation des rencontres.
Sur le plan fiscal, les gains distribués aux joueurs amateurs restent exonérés jusqu’à 300 € par événement ; au-delà, ils constituent un revenu imposable. Les équipes professionnelles, elles, soumettent leurs recettes (cash-prizes, sponsoring, diffusion) à la TVA et à l’impôt sur les sociétés. Une gestion rigoureuse de ces flux évite la requalification en activité de jeux de hasard.
Conclusion
Le statut légal de l’esport repose sur trois piliers : reconnaissance du jeu vidéo compétitif, sécurisation des compétitions par des règles claires et protection sociale des joueurs grâce au contrat dédié. Pour tout acteur du secteur, vérifier le respect de ces textes dès la conception de l’évènement ou du projet d’équipe est la clé d’un développement durable.
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RESSOURCES :
- Code de la Sécurité intérieure, art. L321-8 (legifrance.gouv.fr)
- Décret n° 2017-872 du 9 mai 2017 relatif au statut des joueurs professionnels d’esport
- Code du sport, art. L331-5 sur l’autorisation des manifestations
- Deshoulières Avocats, » Les sites de paris sportifs en ligne sont-il licites ? «