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L’œuvre composite : entre création et droits d’auteur

Découvrez comment le droit encadre la création d’une œuvre nouvelle intégrant une œuvre préexistante et apprenez qui détient les droits et quelles limites s’imposent à l’auteur, avant d’explorer les enjeux pratiques pour innover sans risquer la contrefaçon.

L’œuvre composite : entre création et droits d’auteur

1) Définition et naissance de l’œuvre composite

L’œuvre composite naît d’une fusion entre un élément préexistant et une création originale. D’après l’article L. 113-2 du Code de la propriété intellectuelle, l’œuvre composite est « l’œuvre nouvelle à laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière ». Ainsi, deux critères s’imposent :

  • L’incorporation de l’œuvre initiale ;
  • L’absence de participation de son auteur.

L’incorporation peut prendre plusieurs formes. Elle va de l’insertion brute d’images ou de textes dans un nouveau support jusqu’à la réutilisation de mélodies ou de séquences audiovisuelles. En outre, la création doit dégager sa propre originalité. Elle ne peut se limiter à un simple habillage technique ou à la reproduction fidèle de l’œuvre première. Enfin, l’auteur de l’œuvre initiale ne doit pas avoir contribué à la nouvelle création : cette distinction le sépare clairement de l’œuvre de collaboration.

2) Incorporation et exigence d’originalité de l’œuvre composite

D’un côté, l’incorporation vise tout apport tangible issu de l’œuvre première. Par exemple, l’intégration d’une photographie dans une affiche publicitaire constitue une œuvre composite. De même, l’usage d’une bande-son préexistante pour un poème mis en musique entre sous le statut d’œuvre composite.

De l’autre, l’œuvre composite doit apporter une valeur créative supérieure à la simple juxtaposition. Ainsi, une version colorisée d’un film ne suffit pas à créer une œuvre composite, car l’opération reste technique et dénuée de création propre. De même, la reproduction tolérante d’un logiciel sans apporter de nouveauté fonctionnelle ou esthétique ne constitue pas une œuvre composite.

Cependant, la jurisprudence reste ouverte à de larges interprétations. Par exemple, l’orchestration nouvelle des « Tableaux d’une exposition » de Moussorgsky par Maurice Ravel a été retenue comme œuvre composite. De même, la sculpture appropriative de Jeff Koons tirée d’une photographie publicitaire a été qualifiée d’œuvre composite, au motif que l’artiste a injecté sa propre vision dans l’élément initial.

3) Absence de collaboration de l’auteur initial dans l’œuvre composite

Pour distinguer l’œuvre composite de l’œuvre de collaboration, l’absence de concertation entre auteurs s’avère décisive. Si l’auteur de l’œuvre préexistante contribue activement, il devient un coauteur et la création relève alors de la collaboration ; en l’absence de toute discussion ou validation, le projet bascule dans la catégorie de l’œuvre composite.

Ainsi, un roman tiré d’un scénario antérieur dont l’auteur du scénario n’a pas participé à l’écriture du roman constitue une œuvre composite. De même, l’intégration d’un texte dans une chanson sans accord du parolier initial confère à l’interprétation le statut d’œuvre composite.

Cependant, le simple fait que l’auteur initial n’ait pas signé un contrat ou ne soit pas physiquement présent n’exclut pas toujours la collaboration. Les juges s’intéressent au « concert intellectuel » entre créateurs. Ils recherchent une volonté commune de création pour qualifier une œuvre de collaboration. À défaut de preuve d’un tel accord, l’œuvre reste composite.

4) Droits, limites et équilibrage des intérêts

L’auteur de l’œuvre composite acquiert le droit d’auteur sur sa création, sous réserve des droits de l’auteur initial (art. L. 113-4 du Code de la Propriété Intellectuelle). En conséquence, l’auteur compositeur contrôle l’exploitation de sa version nouvelle, mais doit respecter le monopole de l’auteur de l’œuvre première. Ainsi, toute exploitation commerciale nécessite l’autorisation préalable de ce dernier.

Par ailleurs, l’auteur initial conserve le droit de poursuivre ou de reprendre l’exploitation de son œuvre. En l’absence d’accord, il peut réclamer la cessation de l’exploitation de l’œuvre composite et engager des poursuites pour contrefaçon. En pratique, l’auteur compositeur ne doit pas publier ni diffuser sa création avant d’obtenir le consentement écrit du titulaire initial.

Cependant, la liberté d’expression artistique peut, dans de rares cas, tempérer ce monopole. La Cour de cassation, dans l’arrêt Klasen (15 mai 2015), a invité à trouver un équilibre entre droit d’auteur et liberté de création. Mais la Cour de justice de l’Union européenne a restreint cette approche en affirmant que seule l’exception de parodie figurant à l’article 5 de la directive 2001/29 peut justifier une limitation au droit d’auteur.

Enfin, face aux pratiques émergentes de remix, sampling ou mashup sur internet, le débat sur une éventuelle exception pour œuvres transformatives reste ouvert. Le livre vert de la Commission européenne de 2008 a souligné le frein que représente l’obligation d’autorisation systématique pour l’innovation. Pour l’heure, la France encourage les micro-licences et la négociation collective via les plateformes.

Conclusion

Pour créer une œuvre composite, assurez-vous de respecter deux conditions clés : apporter une originalité propre et ne pas collaborer avec l’auteur initial sans accord. Obtenez toujours une licence avant d’exploiter votre création. Enfin, si vous envisagez un projet majeur, envisagez un accompagnement juridique pour sécuriser vos droits.

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